Printemps précoce (早春, Soshun) film japonais de Yasujirô Ozu, sorti en 1956
Dans la métropole de Tokyo, l'employé de bureau Shoji Sugiyama se prépare à partir travailler avec l'aide de sa femme, Masako. Leur seul enfant est mort quelques années auparavant de maladie. Au cours d'une sortie avec ses amis et collègues, Shoji passe du temps avec une secrétaire, Kaneko, surnommée « Poisson rouge » pour ses grands yeux. Peu de temps après, ils ont une relation éphémère. Mais Masako soupçonne cette liaison et décide de quitter le domicile conjugal.
Ce que met en scène Printemps précoce est un groupe extrêmement original dans l'histoire du cinéma, «le Club des usagers du train de 8h28». Le personnage principal Sugi et ses compagnons habitent tous dans un quartier du sud-ouest de Tokyo, Kamata. Nous sommes aux confins de Tokyo. Chaque matin à 8 h 28, ils prennent le train de la ligne Keihin-Tohoku au départ de Kamata, à destination d'Omiya, pour descendre au centre de Tokyo, dans le riche quartier d'affaires de Marunouchi. À force de se rencontrer sur les quais de la gare de Kamata ou dans le train bondé, ils finissent par sympathiser, au point de se retrouver chez les uns et les autres pour boire un verre ou partir en pique-nique le dimanche à Enoshima.
La particularité du Club des usagers du train de 8 h 28 est d'avoir vu éclore leur amitié pendant leurs déplacements. Plus que dans leurs familles ou avec les collègues au travail, c'est durant ce court voyage qu'ils effectuent ensemble quotidiennement qu'ils éprouvent des moments de bonheur. Un amour naît au sein du Club des usagers du train. C'est la liaison entre Sugi et une jeune femme, Chiyo. La scène où le couple s'embrasse dans un salon privé du restaurant est exceptionnellement erotique dans le cinéma d'Ozu, qui, habituellement, ne décrit pas de manière directe le désir sexuel.
Ozu, en décrivant le désarroi des jeunes de Tokyo qui, dans l'expansion économique de l'après-guerre, ont perdu de vue la morale, sonne la fin brutale de leur jeunesse. Lors de la soirée d'adieu qu'ils organisent en l'honneur de Shoji qui est muté dans l'ouest du Japon, les membres du Club des usagers entonnent par deux fois une célèbre chanson folklorique écossaise, «Auld Long Syne». Les yeux de Kingyo, chantant avec les autres, sont humides. C'est une extraordinaire scène d'adieu. «Auld Long Syne» est, paraît-il, chantée en Ecosse lors de retrouvailles entre vieux amis, mais au Japon, sous le titre de « Hotaru no hikari » (« La lueur des lucioles»), il est d'usage de la chanter au moment de se séparer, à l'occasion de cérémonies de fin d'études ou d'adieux entre amis, pour se souhaiter mutuellement santé et bonheur.
Installé à Mitsuishi, dans la préfecture d'Okayama, Shoji passe son temps à lire mais bientôt sa femme le rejoint et leur couple décide de se redonner une nouvelle chance.
Alors qu'il tournait à peu près un film par an, Ozu prend le temps, après le succès du "Voyage à Tokyo", considéré comme un chef-d'oeuvre de l'histoire du cinéma. Ozu lui-même a sans doute réalisé "Voyage à Tokyo" comme une synthèse de sa carrière, en sachant, quelque part, qu'on en parlerait plus tard comme d'une de ses œuvres majeures. Probablement avait-il besoin de repos et de temps, d'autant plus que le film suivant se devait d'être d'une nature totalement différente. La déception et la résignation dont font preuve les vieux parents, face au mode de vie de leurs fils et filles devenus adultes, et leur maigre satisfaction, ont constitué l'axe principal des films d'Ozu, tournés après la guerre. Printemps précoce se veut donc en rupture avec la carrière passée d'Ozu.
Distribution
- Ryô Ikebe : Shoji Sugiyama, un employé de bureau infidèle
- Chikage Awashima : Masako Sugiyama, sa femme
- Keiko Kishi : Chiyo Kaneko, une secrétaire qui devient la maîtresse de Shoji
- Daisuke Katō : Sakamoto
- Kuniko Miyake : Yukiko Kawai
- Chishu Ryu : Kiichi Onodera
- Haruko Sugimura : Tamako Tamura
- Takako Fujino : Terumi Aoki
Fiche technique
- Titre original : 早春, Soshun
- Réalisation : Yasujirô Ozu
- Scénario : Kōgo Noda, Yasujirô Ozu
- Producteur : Shizuo Yamanouchi
- Musique : Kojun Saitô
- Directeur de la photographie : Yuharu Atsuta
- Montage : Yoshiyasu Hamamura
- Société de production et de distribution au Japon : Shôchiku
- Durée : 144 minutes
- Date de sortie : 29 janvier 1956
